Dans un entretien au journal Ouest-France publié il y a quelques jours, la ministre de la réforme de l’Etat et de la décentralisation, Marylise Lebranchu dévoile ce qui pourrait être les principaux points de sa réforme territoriale.

Mme Lebranchu, à gauche, avec les députés ayant voté l’amendement « Le Fur-De Rugy« .
Sans pour autant remettre en cause l’existence des communes ou des départements, la ministre propose la création d’une «instance régionale réunissant tous les niveaux de collectivités, pour mieux définir qui fait quoi». Elle dit vouloir «conforter la région dans ses compétences», voir même ouvrir les régions à des compétence variables en proposant «d’ouvrir un droit à l’expérimentation, par exemple pour la région Bretagne».
Pour ce qui concerne la réunification de la Bretagne, l’ancienne député du Finistère avait voté l’amendement Le Fur-De Rugy en décembre dernier, permettant notamment de réunifier Loire-Atlantique et région Bretagne en consultant la population et sans droit de veto des édiles de la région Pays de la Loire. Mais, devenu ministre du gouvernement de Jean-Marc Ayrault, la donne ne semble plus la même.
En effet, à la question «Vous conserveriez la possibilité pour deux collectivités de se marier ?», celle-ci dit être favorable à la collectivité unique d’Alsace, mais «la discussion doit se faire sur des bases claires, en portant attention à l’équilibre global des territoires. Si l’on crée un couple Nantes-Rennes par exemple, le risque de voir l’activité économique se concentrer autour du sud-est de la Bretagne existe.»
Comme la ministre, nous souhaiterions que la discussion se fasse sur des bases claires. Mais, à la question sur le mariage de deux collectivités, et en l’occurrence Loire-Atlantique et région Bretagne, Mme Lebranchu parle du couple Nantes-Rennes. Pourtant, l’amendement à la loi sur le référendum d’initiative populaire votée le 21 décembre dernier à l’assemblée, mais abandonnée cause de trêve parlementaire, parle bien d’un département et d’une région, pas de deux agglomérations.
Le «danger» du couple Nantes – Rennes, est bien celui du projet de métropolisation qui, par définition concentre l’économie, les services, les emplois, etc… mais aussi la pollution, les gaz à effet de serre, l’éloignement entre lieu de travail et domicile. Or ce «couple» Nantes-Rennes existe déjà malgré la partition de la Bretagne, il s’est exprimé comme «épine dorsale» de l’aire de coopération métropolitaine «Loire-Bretagne». Il s’en suit, comme s’en inquiète la ministre, une espèce de confiscation des compétences et du développement au détriment du reste du territoire de la Bretagne, mais aussi de l’ouest de la France.
La réunification de la Bretagne, c’est à dire la fusion de la Loire-Atlantique au sein d’une collectivité bretonne à cinq départements, dotée de compétences élargies notamment en termes économique, écologique, d’innovation, d’aménagement, etc … est justement la possibilité de réduire ce déséquilibre démographique et économique dont souffre déjà la Bretagne. Il y a clairement besoin d’un niveau de collectivité capable de réguler le rôle «aspirateur» des villes de Nantes et Rennes dont la métropolisation est le symbole. Le découpage administratif actuel encourage ce phénomène avec deux capitales régionales proches mais en incohérence avec leurs territoires régionales. Rennes est terrienne dans une région maritime et Nantes est maritime dans une région terrienne.
C’est bien la «métropolisation» de Nantes et Rennes et la partition de la Bretagne qui provoquent un déséquilibre au sein de l’espace breton. En ce sens la possible réunification de la Loire-Atlantique avec le reste de la Bretagne est bien une solution face à ce déséquilibre et non un problème. Le projet de gouvernement de François Hollande promet de « répondre aux demandes citoyennes, rééquilibrer nos institutions, simplifier nos administrations, encourager la démocratie territoriale, une meilleure prise en compte de la démocratie participative. », il propose « une loi sur le renforcement de la démocratie et des libertés locales ». L’acte III de la décentralisation, voulu par la ministre, ne pourra donc une nouvelle fois s’abstenir de proposer une réponse à la partition administrative de la Bretagne, contestée par une grande part de la population et des milliers d’élus locaux, ceci au risque d’accélérer les déséquilibres territoriaux et les crispations démocratiques.
Pour 44=Breizh, Jonathan Guillaume